Pionnier de la virologie africaine, il a consacré sa vie à combattre les virus meurtriers. Né en
1942 dans le Bandundu en République Démocratique du Congo, il fit ses études de médecine
à l’Université Lovanium avant de décrocher un doctorat en virologie à Louvain.
En 1976, il entre dans l’histoire comme le premier scientifique à entrer en contact avec le
virus Ebola et à en réchapper. C’est lui qui envoie les échantillons permettant à Peter Piot et
son équipe d’identifier le virus. Par la suite, il dirigea la riposte contre les grandes épidémies
de 1995 et 2018, et participa au développement du traitement innovant mAb114, basé sur les
anticorps de survivants.
Aujourd’hui directeur de l’Institut National de Recherche Biomédicale à Kinshasa, il
coordonne également la réponse congolaise à la pandémie de Covid-19. Convaincu que
l’Afrique doit tracer sa propre voie scientifique, il affirme : « L’Afrique doit produire sa
propre science pour répondre à ses propres défis. »
Quarante ans après ses débuts dans un village frappé par une fièvre inconnue, le professeur
Muyembe est reconnu comme l’un des plus grands virologues de notre temps et un véritable
héros de la santé mondiale.
Dans les couloirs de l’INRB à Kinshasa, le Dr. Jean-Jacques Muyembe est accueilli avec un
mélange de respect et de déférence. « Ici, tout le monde l’appelle Papa Ebola », sourit un
jeune chercheur, en référence à son rôle historique dans la découverte et le combat acharné
contre ce virus redoutable.
Né en 1942 dans le Kasaï, Muyembe a grandi dans un Congo en mutation. Passionné par la
médecine, il étudia à l’Université de Kinshasa avant de poursuivre une formation en virologie
à Louvain, en Belgique. Mais c’est en 1976 que son destin bascula.
Le premier à affronter Ebola
Cette année-là, une mystérieuse épidémie ravageait un village de la province de l’Équateur.
Alors que d’autres médecins hésitaient à s’approcher, Muyembe prit le risque. « Je savais que
si je n’y allais pas, personne n’irait », raconta-t-il plus tard.
C’est lui qui préleva les premiers échantillons de sang, ouvrant la voie à l’identification du
virus Ebola par une équipe internationale menée par Peter Piot. « Sans le courage de
Muyembe, nous n’aurions jamais découvert Ebola », témoignera Piot des années plus tard.
Des décennies de combat
Mais la découverte ne fut que le début. Pendant plus de 40 ans, Muyembe mena une guerre
scientifique contre Ebola. Il mit en place des protocoles de soins, forma des équipes locales et
insista toujours sur l’importance d’associer les communautés locales à la lutte contre les
épidémies.
Il participa aux essais cliniques de l’anticorps monoclonal mAb114, développé à partir du
sang d’un survivant congolais. Ce traitement est aujourd’hui validé par l’OMS et constitue
une avancée majeure dans la prise en charge d’Ebola.
« C’est un exemple parfait de comment l’Afrique peut être non seulement le terrain de
l’épidémie mais aussi le terrain de la solution », souligne le Dr. Anthony Fauci, ancien
directeur du NIAID aux États-Unis.
Une reconnaissance mondiale
De Kinshasa à Genève, le nom de Muyembe résonne dans les cercles scientifiques. Lauréat du
Prix Christophe Mérieux, du Prix Hideyo Noguchi Africa et du prestigieux Prix Gairdner
Global Health, il est aujourd’hui considéré comme l’un des géants de la virologie moderne.
Pourtant, l’homme reste humble : « Je n’ai fait que mon devoir. Mon rêve est de voir une
Afrique qui produit sa propre science et protège ses propres populations. »
L’Afrique comme moteur scientifique
Muyembe n’est pas seulement un chercheur, il est aussi un bâtisseur. À la tête de l’Institut
National de Recherche Biomédicale (INRB), il a formé une génération de virologues
africains capables d’affronter non seulement Ebola, mais aussi des menaces globales comme
la Covid-19.
En 2020, alors que le monde entier faisait face à la pandémie, il rappela une leçon simple mais
essentielle :« Les virus n’ont pas de frontières. Si l’Afrique est protégée, le monde l’est aussi.
Un héritage durable
Aujourd’hui, le Dr. Jean-Jacques Muyembe est plus qu’un scientifique : il est une icône. Son
parcours raconte l’histoire d’un continent souvent perçu comme vulnérable, mais qui peut être
à l’avant-garde de l’innovation biomédicale mondiale.
« Le professeur Muyembe est un héros silencieux », dit un de ses pairs congolais. « Il a
prouvé que l’excellence africaine existe et qu’elle peut sauver le monde. »
De l’Équateur congolais aux laboratoires les plus avancés de la planète, son héritage résonne
comme une promesse : celle d’une Afrique actrice, et non spectatrice, des grandes révolutions
scientifiques.