Thomas Sankara : L’Incorruptible qui voulait réinventer l’Afrique

En quatre ans, il a rebaptisé son pays, lancé une révolution sociale et écologique, et
incarné l’intégrité politique. Aujourd’hui, son appel à “oser inventer l’avenir” résonne
comme jamais.


Contexte : Capitaine de l’armée burkinabè, Thomas Sankara prend le pouvoir par un coup
d’État en 1983 dans l’un des pays les plus pauvres du monde, la Haute-Volta. Il arrive à la tête
d’une nation confrontée à une dépendance économique prononcée, une pauvreté généralisée,
un analphabétisme endémique et une corruption rampante, héritage direct du colonialisme et
des décennies d’une gouvernance post-indépendance souvent inefficace. Dans un continent où
les dirigeants post-indépendance adoptaient souvent des modèles de développement exogènes,
Sankara proposait une rupture radicale.


Vision : La vision de Sankara était celle d’une Afrique libérée, souveraine et digne, capable
de compter sur ses propres forces. Il aspirait à une transformation radicale de la société, axée
sur l’autosuffisance alimentaire, la justice sociale, l’égalité des sexes et la protection de
l’environnement. Il rebaptisa la Haute-Volta en « Burkina Faso » (« pays des hommes intègres »),
symbolisant cette nouvelle ère d’autonomie et de fierté nationale, rejetant ouvertement le
néocolonialisme et les ingérences étrangères, prônant l’unité africaine et une véritable
solidarité Sud-Sud. Sa conception du développement était endogène, refusant l’aide
conditionnée qui perpétuait la dépendance.


Combats : Sankara s’engagea dans une série de réformes audacieuses : une réforme agraire
pour distribuer les terres aux paysans, des programmes massifs de vaccination qui permirent
de vacciner des millions d’enfants, la construction de milliers d’écoles, et une ambitieuse
campagne de reboisement à grande échelle pour lutter contre la désertification. Il s’opposa
farouchement aux institutions financières internationales (FMI, Banque Mondiale), dénonçant
la « dette odieuse » qui étranglait les nations africaines, et prôna un front uni des pays africains
pour y faire face. Sur le plan social, il lutta activement contre l’excision, la polygamie, et
promut l’accès des femmes à des postes clés, y compris dans l’armée. Son style de vie simple
et son refus du luxe d’État devinrent légendaires, incarnant son combat implacable contre la
corruption et le clientélisme.


Héritage : Assassiné lors d’un coup d’État en 1987, l’héritage de Thomas Sankara est
complexe mais incroyablement puissant, transcendant les frontières de son pays. Il est devenu
une figure iconique de la résistance panafricaine, un symbole d’intégrité, de dignité et de
vision pour une jeunesse africaine et mondiale cherchant des modèles d’émancipation. Ses
idées sur l’autosuffisance alimentaire, la souveraineté économique, la justice sociale,
l’écologie et l’anti-impérialisme continuent d’inspirer des mouvements sociaux, des
universitaires et des leaders politiques à travers le continent et la diaspora. Des groupes
d’activistes et des forums intellectuels perpétuent sa pensée, analysant ses politiques pour
l’adapter aux défis contemporains. L’engouement autour de sa figure, notamment par la
musique, le cinéma et la littérature, témoigne d’une quête ininterrompue d’un modèle de
développement africain authentique et souverain, prouvant que sa « révolution » n’est pas morte
avec lui mais continue d’irriguer les esprits.


Citation clé : « Oser inventer l’avenir. »

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